Une des questions qui m'ont été le plus souvent posées depuis le début de ma résidence concerne la façon de soumettre son manuscrit à des maisons d'édition. Je parle ici des maisons pour lesquelles j'ai travaillé au Québec. Je sais qu'en France et aux États-Unis, le processus est différent. Pour le Canada anglais, je ne sais même pas! 😳
Ici, on n'a pas besoin de passer par un agent pour soumettre son livre. De plus, la plupart des maisons demandent un manuscrit complet, pas seulement quelques chapitres ou un synopsis. La raison est la suivante: on veut être sûr-e que le livre sera bel et bien terminé un jour!
Mes conseils:
«Magasiner» votre maison d'édition. Allez en bibliothèque ou en librairie et observez les livres qui sont du même genre que le vôtre. Notez les maisons d'édition qui les ont publiés, susceptibles d'être intéressées par votre projet. N'envoyez pas de la poésie à une maison qui fait des guides pratiques et des romans de genre grand public. Le critère no 1 dans le choix d'un manuscrit est le suivant: est-ce qu'il correspond à la ligne éditoriale de la maison? N'envoyez pas votre manuscrit à gauche et à droite sans discernement. On sait tout de suite quand on reçoit un envoi de ce genre. Interrogez-vous aussi sur le type de maisons avec laquelle vous souhaitez collaborer. Une maison avec beaucoup de moyens, qui fait beaucoup de promotion? Une petite maison plus modeste, mais avec un esprit de famille? Etc.
Visitez le site des maisons d'édition ciblées. La plupart des maisons indiquent de quelle façon leur soumettre un manuscrit, généralement électroniquement. Certaines acceptent encore les manuscrits papier. Certaines demandent une mise en forme particulière (double interligne, police de caractères précise, etc.), pour des questions de lisibilité. Mettez les chances de votre côté en respectant les demandes de chacune.
Envoyez votre manuscrit à plusieurs endroits (ciblés) à la fois. Vous avez une maison chouchou? Rien ne vous empêche de lui donner quelques semaines d'avance en ne l'envoyant qu'à cet endroit au départ. Mais je vous conseille de ne pas attendre une réponse, qui peut parfois mettre des mois à arriver. Ce serait dommage d'avoir perdu tout ce temps, advenant une réponse négative. Par contre, si jamais une maison concurrente vous contacte en premier, vous pouvez attendre avant de signer un contrat et faire signe à la maison de votre choix. Dites-lui: «J'ai une offre de votre concurrente, mais j'aimerais beaucoup publier chez vous.» Une ou un éditeur ne laissera pas son concurrent s'emparer d'un potentiel succès! Elle ou il jettera assurément un coup d'oeil à votre manuscrit. Peut-être qu'il sera refusé, mais au moins vous en aurez le cœur net avant de vous embarquer ailleurs.
Travaillez votre lettre de présentation. Dans votre lettre, vous pouvez vous présenter brièvement, mais ne racontez pas votre vie à moins que vous ayez une expertise en lien direct avec le projet que vous présentez (par exemple, vous êtes travailleuse de rue et vous écrivez sur les gangs). Un synopsis du projet est encouragé, mais allez à l'essentiel. Votre manuscrit parlera pour vous. (À moins que la maison demande précisément un synopsis sur son site.) Pour moi, l'élément le plus important de la lettre est de dire: j'ai délibérément choisi votre maison, et voici pourquoi: j'ai lu tel et tel livres, et je pense que mon manuscrit correspond à votre style. Ou encore: j'adore tel auteur que vous publiez. L'important, ici, c'est de prouver que vous n'envoyez pas votre manuscrit à l'aveuglette. En montrant que vous savez quelle est la ligne éditoriale de la maison et que vous pensez y correspondre, vous attirerez l'attention de façon favorable.
Soignez les premières et dernières pages de votre manuscrit. Certaines maisons reçoivent un volume incroyable de manuscrits, mais la plupart ont des équipes réduites. Donc, malheureusement, tous les manuscrits ne sont pas nécessairement lus en entier. Dans certains cas, on va lire seulement le début et la fin. Essayez donc d'avoir un début accrocheur, où on sent bien le ton et l'esprit du livre. Quant à la fin, elle doit être cohérente, bien entendu! Simplement, prêtez-y une attention particulière à la relecture. Surtout que, eh bien, c'est la fin! Parfois on est fatigué-e quand on y arrive. La relire attentivement le lendemain ou quelques jours plus tard vous fera peut-être prendre conscience de tics ou de maladresses.
Ne vous découragez pas! Il arrive que des manuscrits soient refusés pour un tas de raisons: la ligne éditoriale change, ou encore le calendrier est plein pour une collection particulière. Les maisons doivent accommoder les auteurs et autrices avec qui elles travaillent déjà, ce qui peut laisser moins de place à la nouveauté. Dans certains cas, on soulignera le potentiel de votre projet, malgré un refus. Il vous est tout à fait possible de vous atteler à la tâche et de renvoyer une nouvelle mouture.
Surtout, rappelez-vous: on peut être un auteur ou autrice qui a publié, qui connaît des gens à l'emploi de plusieurs maisons d'édition, et quand même recevoir des refus. Ça ne signifie pas que votre manuscrit n'a pas de valeur ou que vous n'avez pas de talent. 🙂
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